Folio
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Une femme à Berlin ; journal 20 avril-22 juin 1945
Anonyme
- Folio
- Folio
- 17 Janvier 2008
- 9782070349494
La jeune Berlinoise qui a rédigé ce journal, du 20 avril 1945 - les Soviétiques sont aux portes - jusqu'au 22 juin, a voulu rester anonyme, lors de la première publication du livre en 1954, et après. À la lecture de son témoignage, on comprend pourquoi.
Sur un ton d'objectivité presque froide, ou alors sarcastique, toujours précis, parfois poignant, parfois comique, c'est la vie quotidienne dans un immeuble quasi en ruine, habité par des femmes de tout âge, des hommes qui se cachent : vie misérable, dans la peur, le froid, la saleté et la faim, scandée par les bombardements d'abord, sous une occupation brutale ensuite. S'ajoutent alors les viols, la honte, la banalisation de l'effroi.
C'est la véracité sans fard et sans phrases qui fait la valeur de ce récit terrible, c'est aussi la lucidité du regard porté sur un Berlin tétanisé par la défaite. Et la plume de l'auteur anonyme rend admirablement ce mélange de dignité, de cynisme et d'humour qui lui a permis, sans doute, de survivre.
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«Je ne suis pas marchand d'art, je suis galeriste» avait coutume de répéter Leo Castelli. Il a régné sur l'art contemporain international pendant plus de quarante ans, au point d'en changer toutes les règles. Après avoir vécu dans de grandes villes d'Europe (Trieste, Vienne, Milan, Budapest, Bucarest et Paris), aux prises avec les convulsions historiques du siècle, ce grand bourgeois dilettante rejoint les États-Unis en 1941, où il ouvre sa propre galerie à New York, en 1957, à l'âge de cinquante ans. Fasciné par les artistes, ses «héros», il découvre les grands Américains des sixties (Jasper Johns, Robert Rauschenberg, Frank Stella, Roy Lichtenstein, Andy Warhol, James Rosenquist), et les mouvements esthétiques (le Pop Art, l'art minimal, l'art conceptuel), qu'il insère dans le cours de l'histoire de l'art. Organisée à l'européenne et gérée à l'américaine, la galerie Castelli invente la première forme de globalisation du marché de l'art et devient une institution incontournable. En quelques années, le galeriste transforme le statut de l'artiste aux États-Unis, assurant à l'art américain, pendant près de quatre décennies, une absolue hégémonie sur la scène internationale. Les consécrations à la Biennale de Venise pour Robert Rauschenberg en 1964, et Jasper Johns en 1988, sont de nouveaux coups de maître pour Castelli, jusqu'à ce que le marché de l'art américain s'emballe dans la fièvre de la montée des prix. Pourtant, derrière la personnalité d'un personnage érudit, affable et médiatique, se cache une histoire beaucoup plus complexe et mystérieuse qu'il ne le laissait paraître. Grâce à de nombreux entretiens réalisés dans le monde entier et à des documents d'archives inédits, Annie Cohen-Solal, biographe de Sartre et auteur de «Un jour ils auront des peintres», nous transporte d'Italie en Hongrie, en Roumanie, en France et aux États-Unis, pour raconter la passionnante trajectoire du galeriste, découvrant que sa fonction ressemblait étrangement à celle de ses propres ancêtres, et de ces agents qui travaillaient auprès des Médicis, dans la Toscane de la Renaissance.
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Pourquoi le 18 juin 1901 Picasso est-il «signalé comme anarchiste» à la Préfecture de police, quinze jours avant sa première exposition parisienne ? Pourquoi le 1er décembre 1914 près de sept cents peintures, dessins et autres oeuvres de sa période cubiste sont-ils séquestrés par le gouvernement français pour une période de près de dix ans ? D'où vient l'absence quasi totale de ses tableaux dans les collections publiques du pays jusqu'en 1947 ? Comment expliquer, enfin, que Picasso ne soit jamais devenu citoyen français ?Si l'oeuvre de l'artiste a suscité expositions, ouvrages et commentaires en progression exponentielle à la hauteur de son immense talent, la situation de Picasso, un «étranger» en France, a paradoxalement été négligée.Cet angle inédit permet à Annie Cohen-Solal de nous entraîner dans une enquête stupéfiante sur les pas d'Un étranger nommé Picasso, artiste surdoué, naviguant en grand stratège dans une France travaillée par ses propres tensions.
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La mort de Louis XIV : apogée et crépuscule de la royauté (1 septembre 1715)
Joël Cornette
- Folio
- Folio Histoire
- 12 Janvier 2023
- 9782073001474
Cette journée fut la seule dont la maîtrise aura échappé au Grand Roi, lui qui se voulait l'ordonnateur tout-puissant de son royaume. Interroger la portée de la mort de Louis XIV conduit à reconsidérer ce très long règne à l'aune du projet politique que ce prince avait lui-même conçu. Ce livre donne à comprendre ce qui s'éteint avec le Roi-Soleil et ce qui va perdurer de son oeuvre. Qu'est-ce qui fait la singulière grandeur du siècle de Louis XIV ? La gloire, le roi de guerre, l'«État machine», la fabrique d'une culture royale : ce souverain a élevé le prestige de la monarchie française au sommet de son rayonnement ; il a achevé d'installer l'appareil administratif de l'Ancien Régime en l'inscrivant dans le patrimoine génétique de nos institutions ; il a érigé les «mystères de l'État» en méthode de gouvernement et fait pénétrer l'éclat de sa figure sacrée jusque dans la plus humble chaumière. Ce fut une ambition démesurée que les épreuves finiront par dérégler. Quel contraste entre le jeune monarque, ardent réformateur des «années Colbert», qui imprime sa marque à toutes les formes de création dans l'effervescence d'un Versailles baroque et festif, et le vieux roi éprouvé par des guerres interminables, cabré dans la dévotion en pourchassant les ennemis de la foi ! La mort de Louis XIV clôt un chapitre de l'histoire de la royauté et en ouvre un autre : à l'aube du siècle des Lumières, c'est la «manière» de ce monarque, c'est aussi une certaine conception de l'autorité, qui meurent avec lui.
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Le nazisme demeure une énigme majeure posée aux historiens. Tour à tour, ceux-ci l'ont expliqué par le phénomène général du fascisme - sans rendre raison de la question raciale, périphérique dans le fascisme italien, centrale dans le régime hitlérien ; par le totalitarisme antibourgeois - entre le nazisme et le stalinisme les différences de buts, d'idéologie, de structures économiques et sociales l'emportent sur les similitudes d'apparence ; par la personnalité de Hitler, décidant tout et tout seul - au risque de ne pouvoir dire pourquoi le régime hitlérien consista en une polycratie, multiplicité de centres de pouvoir et d'initiatives bureaucratiques.Entre l'omnipotence diabolique de Hitler et la description de son pouvoir comme celui d'un «dictateur faible» face à un appareil d'État tout-puissant, Ian Kershaw risque une vision nouvelle. Ce qui devient objet d'histoire, ce n'est plus Hitler, mais sa position exceptionnelle, réelle, immense et qui excédait la mesure d'un individu sans qualité, tribun de brasserie, déclassé social, artiste raté. L'autorité charismatique qu'il exerça se fondait sur la perception, toujours renouvelée, par la masse de qualités, d'une mission, d'un héroïsme supposés du chef.Le charisme permet enfin de penser ensemble tous les traits que les interprétations précédentes avaient jusqu'alors séparément soulignés : le pouvoir de Hitler résultait de la collaboration, de la tolérance, des faux espoirs, de la faiblesse de tous ceux qui reportèrent leurs attentes ou ressentiments dans la personne du dictateur.
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«Pourquoi jouer tant de notes alors qu'il suffit de jouer les plus belles?»Miles Davis (1926-1991), trompettiste au son bouleversant, a profondément marqué l'histoire du jazz, de la musique. Sa vie, c'est la musique. Sa voix unique, fragile et puissante, intense, c'est la trompette.Son père l'éclaire dès le plus jeune âge sur le racisme auquel il sera confronté tout au long de sa vie. Son combat, Miles décide de le mener à travers la musique, en devenant un artiste noir respecté.Au fil de sa carrière, celui que l'on présente comme le «Picasso du jazz» n'a de cesse d'innover, de se réinventer:les albums se suivent mais ne se ressemblent pas. Même si l'homme derrière la trompette est réputé difficile et colérique, le musicien fascine et hypnotise, au point de devenir l'une des rares icônes du jazz au succès planétaire.
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«L'imagination gouverne le monde.» Figure universelle du génie humain, Napoléon Bonaparte (1769-1821) a échoué à fonder une dynastie mais a défini la politique moderne. Par son gouvernement, il a montré au monde qu'un pays pouvait vivre durablement sous une autre loi que celle de la monarchie absolue et des privilèges héréditaires et ecclésiastiques. En France, notre Code civil et nombre de nos institutions ont été, depuis leur création par Napoléon, peu ou pas réformés et ont été adoptés et adaptés dans le monde entier. Ramener le destin exceptionnel de celui que Clausewitz appelait le «Dieu de la guerre» à la dimension d'une vie d'homme parmi les hommes est le pari de ce livre. Bonaparte s'est tôt persuadé d'avoir un destin : cette biographie nous raconte les hasards de sa vie. Il s'est peu à peu sacrifié à l'État français jusqu'à sacrifier en lui l'homme privé : Pascale Fautrier lui restitue son humanité, et écrit ici le roman de Bonaparte.
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Pourquoi Byzance ? un empire de onze siècles
Michel Kaplan
- Folio
- Folio Histoire
- 11 Mai 2016
- 9782070341009
Le mardi 29 mai 1453, les armées ottomanes de Mehmet II prennent Constantinople, la capitale inaugurée par Constantin le 11 mai 330. Constantin XI Dragasès, le dernier Empereur des Romains, comme se dénommaient eux-mêmes ceux que nous appelons Byzantins depuis le xvi e siècle, meurt au combat. Sainte-Sophie, alors la plus grande église de la Chrétienté, est aussitôt transformée en mosquée.
L'originalité profonde de cet ouvrage est de restituer l'histoire de l'empire byzantin en fonction des contraintes et des nécessités (politiques, religieuses, physiques, géographiques, culturelles) qui dictèrent cette histoire singulière. Ce faisant, Michel Kaplan évalue la présence de l'héritage byzantin dans l'Europe d'aujourd'hui.
Notre civilisation doit à cet Empire millénaire la transmission de l'héritage de la Grèce antique :
La totalité des ouvrages écrits depuis l' Iliade jusqu'aux Pères de l'Église encore conservés nous ont été transmis par les manuscrits copiés par les Byzantins.
Sur le plan artistique, largement lié à la religion, l'héritage byzantin est presque limité à l'Europe orthodoxe. Le plan en croix grecque, qui est une conséquence du choix de la coupole à l'époque de Justinien, est nettement dominant dans l'Europe orthodoxe (la Bulgarie, la République de Macédoine, le Monténégro, la Serbie, la Roumanie, l'Ukraine et la Russie, pour ne pas parler de la Grèce, l'héritière directe de Byzance). À cet égard, l'événement le plus important de l'histoire byzantine, le rétablissement du culte des images en 843, a dicté la pratique de la religion chrétienne des peuples devenus orthodoxes : ils l'ont développée avec leur génie propre, mais la filiation est incontestable.
Enfin, l'État byzantin a constitué durant tous ces siècles un État de droit. La justice reposait sur le corpus de Justinien; le pouvoir impérial reste jusqu'au bout autocratique par principe, mais le droit prime la force.
Quant à l'histoire de l'Occident, elle prend ses racines dans Théodoric l'Ostrogoth, Clovis le Franc et son continuateur Charlemagne, Otton I er et ses successeurs, autant d'illustres souverains qui prenaient leurs exemples à Constantinople.
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Visionnaire de génie, séducteur invétéré, esprit mordant, léonard de vinci (1452-1519) veut tout connaître du monde.
De la physique à la botanique, de la géologie à l'anatomie, en passant par l'astronomie, la musique, les mathématiques, l'architecture, la sculpture, le dessin, la peinture, rien ne doit échapper à son insatiable curiosité. pourtant, si l'on excepte son goût pour l'organisation de fêtes spectaculaires, nombre de ses travaux restèrent à l'état d'ébauches. ainsi, à peine une douzaine de tableaux peuvent-ils lui être attribués avec certitude.
Et si ce n'étaient les milliers de pages de ses fameux carnets, l'emploi du temps de l'inépuisable inventeur resterait une énigme que sophie chauveau tente ici de percer. en toile de fond : l'italie de la renaissance.
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«Cela fait plus de vingt ans que je me consacre à l'étude de Staline et des mécanismes qui ont sous-tendu son action. Une action qui aboutit à la destruction de millions de vies humaines. Malgré le caractère éprouvant, sur le plan émotionnel, de ce travail, je m'y suis tenu avec constance», écrit Oleg Khlevniuk en introduction à cette nouvelle biographie saluée par la critique internationale.
Unanimement reconnu comme le plus éminent spécialiste russe du stalinisme, fort d'une connaissance exceptionnelle des grands fonds d'archives soviétiques, l'auteur suit la vie et le parcours de ce dictateur hors catégories. Il pose un regard neuf sur le «système de règles» de Staline, les mécanismes politiques de son ascension, les ressorts d'un mode de gouvernance fondé sur un interventionnisme de tous les instants et un travail quotidien titanesque.
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Guillaume le Maréchal : Ou le meilleur chevalier du monde
Georges Duby
- Folio
- Folio Histoire
- 11 Février 1986
- 9782070323449
Guillaume, issu d'un modeste lignage, est né au milieu du XII? siècle. Champion de tournois jusqu'à quarante ans, il a servi fidèlement les Plantagenêts : Henri II, son fils aîné Henri le Jeune et les cadets Richard Coeur de Lion et Jean Sans Terre. En récompense, on lui a donné pour femme l'un des plus beaux partis d'Angleterre. Il a combattu Philippe Auguste et c'est à soixante-treize ans, comme Régent d'Angleterre du jeune Henri III, qu'il a remporté contre le futur Louis VIII la bataille de Lincoln, en 1217, qui obligea les Français à conclure la paix et à évacuer l'Angleterre. Apprenant la mort de Guillaume dans la tradition des Croisés, Philippe Auguste et ses barons le proclamèrent «le meilleur des chevaliers». À travers l'irrésistible ascension de Guillaume le Maréchal, Georges Duby reconstitue, dans l'un de ses plus beaux récits, le théâtre de la chevalerie.
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Jean Moulin ; la république des catacombes Tome 1
Daniel Cordier
- Folio
- Folio Histoire
- 17 Mars 2011
- 9782070349746
Depuis plus de vingt ans, Daniel Cordier a entrepris la rédaction d'une somme sur Jean Moulin dont les trois premiers tomes (parus chez J.-Cl. Lattès en 1989 et 1993) ont fait date dans l'historiographie de la Résistance.
Jean Moulin, la République des catacombes, n'est pas le quatrième tome de cette biographie. Il s'agit d'un travail entrepris à l'occasion du centenaire de la naissance de Jean Moulin, en vue d'offrir à la fois une synthèse complète des connaissances acquises sur l'Inconnu du Panthéon et un grand nombre de documents inédits concernant le pan d'histoire dont il fut l'un des acteurs essentiels. La mission de Jean Moulin dura dix-huit mois, entre sa nomination et sa mort : dix-huit mois au coeur des cinquante mois d'occupation. L'intérêt et l'originalité du présent volume résident dans la mise en perspective de cette mission, rattachée pour la première fois à tout ce qui la précède et la fonde, et surtout à ce qui la prolonge, depuis le drame de Caluire jusqu'à la Libération - et bien au-delà.
La première partie du livre analyse la nature et le déroulement de la mission du délégué personnel du général de Gaulle en France. Chargé d'unifier une résistance intérieure encore éclatée et balbutiante, il lui faudra aussi tenir compte de tout ce qui sépare ces mouvements disparates de la France Libre, constituée en force politique et militaire à Londres. Dissensions idéologiques, luttes d'influence, conflits personnels : déjà l'après-guerre se prépare. Daniel Cordier, acteur devenu historien, éclaire cette période de façon inédite, faisant ressortir des figures légendaires comme celles de Pierre Brossolette ou du colonel Passy dans leur conflit avec Moulin, ou celle, osbcure, de René Hardy, dont le procès, minutieusement analysé ici, révèle a posteriori les enjeux de la Résistance. Une large place est réservée à la tragédie de Caluire.
La seconde partie est consacrée à l'héritage de Jean Moulin, pour la première fois révélé à travers les violentes querelles qu'il suscita au sein de l'état-major de la Réistance et de la France Libre. Pourquoi Brossolette, par exemple, fut-il éliminé de la succession de Moulin ? Cette énigme trouve ici sa réponse. D'autres figures essentielles mais moins connues apparaissent dans toute leur grandeur : celle d'André Philip ou encore celle de Jacques Bingen, qui illustre par son action et son martyre les déchirement de l'après-Moulin.
Enfin, un long « Post-scriptum » apporte une réplique vigoureuse et documentée aux récentes polémiques.
Nul n'était mieux placé que Daniel Cordier pour faire le tableau en grand et en détail des drames et des rivalités qui ont dicté les enjeux de la Libération.
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Napoléon n'a pas manqué de biographes. On s'en étonnerait à tort. Les hommes qui ont laissé une empreinte aussi profonde sur leur époque et sur les imaginations sont-ils si nombreux? L'écho de son extraordinaire aventure a retenti bien au-delà des frontières de la France et même de l'Europe. Depuis, la légende a un peu pâli, le monde a changé. Le mythe s'épuise à mesure que les passions qui l'ont entretenu s'éteignent : celles de la gloire, de l'héroïsme et de la guerre. Toute cette magie est morte avec les hécatombes du XXe siècle. Mais Napoléon n'a pas été seulement un conquérant. Stratège hors pair, il fut aussi le plus doué des élèves de Machiavel dans l'art de gouverner. Plus qu'au guerrier, c'est au Premier consul que vont aujourd'hui les hommages. Ce qui reste, c'est le souvenir d'une volonté éclairée s'appliquant à relever les ruines de la Révolution avec une intelligence, une énergie et une efficacité incomparables - avec brutalité aussi, car on ne saurait ignorer combien cet homme si positif était, pour le meilleur comme pour le pire, étranger à toute idée de bien et de mal. Ce qui, en lui, parle encore aux imaginations modernes, c'est autre chose : la croyance, qui était la sienne, et que nous voudrions être la nôtre, que notre sort ne résistera pas à notre volonté. Bonaparte est une figure de l'individu moderne : l'homme qui s'est créé à force de volonté, de travail et de talent, qui a fait de sa vie un destin en repoussant toutes les limites connues.
Un quart de siècle seulement sépare son entrée sur la scène de l'Histoire de sa disparition. Histoire si brève et si riche - énigmatique aussi par bien des côtés - qu'elle ne peut être traversée trop vite. L'historien ne peut marcher au pas des armées de l'Empereur. Un Napoléon suivra ce Bonaparte. Celui-ci retrace l'histoire du jeune Napoléon, de la Corse aux Tuileries, des années obscures de l'enfance jusqu'à la proclamation du Consulat à vie en 1802 où, sans encore porter le titre d'empereur, il rétablit à son profit la monarchie héréditaire. S'il est dans la vie de chaque homme, comme dit Jorge Luis Borges, un moment où il sait «à jamais qui il est», ce livre s'attache à le découvrir pour comprendre comment Napoléon est devenu Napoléon.
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Un monde à part est un témoignage. Mais il est aussi de la littérature. Albert Camus, dans un raccourci saisissant, affirmait que le livre devait être lu « autant pour ce qu'il est que pour ce qu'il dit ». Ce qu'il dit, c'est l'expérience terrible des victimes des prisons et des camps de travail soviétiques. Ce qu'il est, c'est une oeuvre littéraire parfaitement maîtrisée qui porte l'empreinte d'un écrivain véritable. Condamné en 1939 à cinq ans de travaux forcés, Gustaw Herling passe deux ans dans le camp de Yertsevo qui fait partie de l'ensemble concentrationnaire de Kargopol sur la mer Blanche (30 000 prisonniers). L'auteur consacre toute son intelligence, tous ses dons d'observation, toute sa sensibilité à dresser une « anatomie » de l'univers concentrationnaire soviétique. Un monde à part appartient à ces livres rarissimes qui fonctionnent entre les générations à la façon d'un mot de passe ou d'un signe de ralliement.
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Jean Moulin - la république des catacombes Tome 2
Daniel Cordier
- Folio
- Folio Histoire
- 17 Mars 2011
- 9782070355198
Depuis plus de vingt ans, Daniel Cordier a entrepris la rédaction d'une somme sur Jean Moulin dont les trois premiers tomes (parus chez J.-Cl. Lattès en 1989 et 1993) ont fait date dans l'historiographie de la Résistance.
Jean Moulin, la République des catacombes, n'est pas le quatrième tome de cette biographie. Il s'agit d'un travail entrepris à l'occasion du centenaire de la naissance de Jean Moulin, en vue d'offrir à la fois une synthèse complète des connaissances acquises sur l'Inconnu du Panthéon et un grand nombre de documents inédits concernant le pan d'histoire dont il fut l'un des acteurs essentiels. La mission de Jean Moulin dura dix-huit mois, entre sa nomination et sa mort : dix-huit mois au coeur des cinquante mois d'occupation. L'intérêt et l'originalité du présent volume résident dans la mise en perspective de cette mission, rattachée pour la première fois à tout ce qui la précède et la fonde, et surtout à ce qui la prolonge, depuis le drame de Caluire jusqu'à la Libération - et bien au-delà.
La première partie du livre analyse la nature et le déroulement de la mission du délégué personnel du général de Gaulle en France. Chargé d'unifier une résistance intérieure encore éclatée et balbutiante, il lui faudra aussi tenir compte de tout ce qui sépare ces mouvements disparates de la France Libre, constituée en force politique et militaire à Londres. Dissensions idéologiques, luttes d'influence, conflits personnels : déjà l'après-guerre se prépare. Daniel Cordier, acteur devenu historien, éclaire cette période de façon inédite, faisant ressortir des figures légendaires comme celles de Pierre Brossolette ou du colonel Passy dans leur conflit avec Moulin, ou celle, osbcure, de René Hardy, dont le procès, minutieusement analysé ici, révèle a posteriori les enjeux de la Résistance. Une large place est réservée à la tragédie de Caluire.
La seconde partie est consacrée à l'héritage de Jean Moulin, pour la première fois révélé à travers les violentes querelles qu'il suscita au sein de l'état-major de la Réistance et de la France Libre. Pourquoi Brossolette, par exemple, fut-il éliminé de la succession de Moulin ? Cette énigme trouve ici sa réponse. D'autres figures essentielles mais moins connues apparaissent dans toute leur grandeur : celle d'André Philip ou encore celle de Jacques Bingen, qui illustre par son action et son martyre les déchirement de l'après-Moulin.
Enfin, un long « Post-scriptum » apporte une réplique vigoureuse et documentée aux récentes polémiques.
Nul n'était mieux placé que Daniel Cordier pour faire le tableau en grand et en détail des drames et des rivalités qui ont dicté les enjeux de la Libération.
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"Le peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre". Surtout connu pour avoir été le Premier ministre du Royaume-Uni durant la Seconde Guerre mondiale, puis de 1951 à 1955, sir Winston (1874-1965) fut un homme aux multiples facettes. Ministre du Commerce, secrétaire du Home Office, Premier Lord de l'Amirauté, ministre de l'Armement, secrétaire d'Etat à la Guerre et secrétaire d'Etat à l'Air, chancelier de l'Echiquier, il occupa de nombreux postes politiques et ministériels.
Mais il fut aussi officier dans l'armée britannique, correspondant de guerre, peintre, journaliste, historien, et obtint même le prix Nobel de littérature. Cette biographie alerte dresse un portrait sans concession d'un homme qui prétendait que la guerre était presque aussi dangereuse que la politique : "Pendant la guerre vous pouvez être tué une seule fois seulement, en politique plusieurs".
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Haï par les uns qui ne voient en lui qu'un antisémite virulent et un nihiliste outrancier, Céline est adulé par les autres qui ne veulent retenir que le caractère fondamentalement novateur de sa littérature. Yves Buin propose une approche critique, montrant que la lumière peut côtoyer la ténèbre.
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Gaston Gallimard ; un demi-siècle d'édition française
Pierre Assouline
- Folio
- Folio
- 6 Avril 2006
- 9782070336807
«Pourquoi Gallimard ? Parce qu'il fut unique et exceptionnel. Certes, de grands éditeurs, il y en eut d'autres et non des moindres. Mais de tous ceux qui s'étaient lancés dans cette aventure au cours de la première décennie du siècle, il fut certainement le seul, au soir de sa vie, à pouvoir éventuellement se permettre de feuilleter l'épais catalogue de sa maison d'édition en se disant : la littérature française, c'est moi.» Pierre Assouline.
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«Si nous n'étions pas contraints de vivre au milieu d'hommes intolérants, mesquins et violents, je serais le premier à rejeter tout nationalisme au profit d'une communauté humaine universelle.» Non, Albert Einstein (1879-1955), allemand de naissance qui devint suisse puis américain, ne participa pas à la construction de la bombe atomique, mais écrivit bien à Roosevelt afin de le convaincre de tout mettre en oeuvre pour devancer les chercheurs nazis dans l'acquisition d'une arme fatale. Non, il n'obtint pas le prix Nobel de physique pour sa théorie de la relativité mais pour son hypothèse audacieuse sur la nature corpusculaire de la lumière. Oui, il fut un père aimant qui adorait ses deux fils, mais ne livra jamais le terrible secret pesant sur sa fille Lieserl. Oui, il s'engagea pleinement dans le sionisme mais déclina la présidence de l'État d'Israël. Oui, il fut menacé par le régime nazi. Oui, il fut considéré par McCarthy comme «un ennemi de l'Amérique». Oui, il fut cet homme hors du commun, profondément pacifiste et humain, qui avait vu son existence bouleversée par la découverte à cinq ans de la boussole et qui vingt ans plus tard changeait le regard de l'humanité sur l'univers.
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« Bienheureux es-tu, Achille, d'avoir eu de ton vivant un ami fidèle, et, après ta mort, un grand héraut de ta gloire ! » Quoique le concernant bien des mystères demeurent - son tombeau n'a jamais été retrouvé, ses écrits ont été perdus -, Alexandre III de Macédoine dit le Grand (356-323 av. J.-C.) reste un des plus fascinants héros de tous les temps. Roi de Macédoine à vingt ans, qui se lancera deux ans plus tard à la conquête d'un empire allant de la Grèce jusqu'à l'Inde, guerrier, certes, mais aussi administrateur et visionnaire, Alexandre le Grand était un homme au caractère contrasté qui, en élève du philosophe Aristote, pouvait se montrer d'une extrême clémence envers les vaincus, comme donner libre cours à sa colère et à sa cruauté. Rêvant d'une fusion entre l'Occident et l'Orient, d'un métissage entre les peuples, d'un brassage des cultures, des arts et des religions, on peut se demander quelle aurait été sa destinée s'il n'était mort, à trente-trois ans, à Babylone, vaincu par la malaria.
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«Je me représente très bien l'époque où les riches répugneront à faire fortune au détriment des pauvres et où ces derniers cesseront d'envier les riches. Même dans le meilleur des mondes, nous ne réussirons pas à supprimer toutes les inégalités, mais nous pouvons et nous devons éviter que les hommes se battent et se détestent.» Rabindranath Tagore lui avait donné le nom de Mahatma, la «Grande Âme», sous lequel le monde entier le connut, l'admira ou le détesta. De son enfance choyée au Goujarati, dans une caste de commerçants, à la découverte de Londres à la fin du XIX? siècle, des premières grandes batailles menées en Afrique du Sud contre le racisme, pour défendre les droits des minorités indiennes, jusqu'au retour en Inde et à la conquête de ses foules immenses, l'histoire de Gandhi (1869-1948), palpitante comme un roman, retrace l'une des grandes aventures du XX? siècle.
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Muse de la raison ; démocratie et exclusion des femmes en France
Geneviève Fraisse
- Folio
- Folio Histoire
- 22 Septembre 1995
- 9782070328963
Pourquoi en france, les femmes participent-elles si peu aux affaires de la cité ? faut-il, en réponse, changer la loi pour changer les moeurs, imposer la parité des hommes et des femmes dans les instances du pouvoir, obliger à des quotas aussi misérables que le retard qu'ils seraient censés combler ? l'écho que cet ouvrage, longtemps introuvable, a rencontré dès sa parution tient à ce que, le premier, liant histoire et philosophie, il a posé la question fondamentale du pourquoi de l'exclusion politique des femmes, en remontant à son origine - la révolution française, celle-là même qui émancipa politiquement les sujets en citoyens.
Car la révolution française tint, y compris chez ses éléments les plus avancés, à marquer la différence des sexes. constance de salm, mme gacon-dufour, cabanis, mme de staël, condorcet, fourier, stendhal, de maistre ou de bonald - toute la révolution est traversée par la question de savoir si le génie peut exister chez une femme, si le sexe de la femme est en rapport avec son cerveau, si les femmes ont le même droit à l'éducation que les hommes, donc à une future citoyenneté.
Cette volonté, qui agite la france bien au-delà de 1789, de marquer une différence entre les sexes là oú l'émancipation politique a effacé les différences entre les êtres permet enfin de comprendre comment une société qui prétend respecter l'identité des personnes assume la différence des sexes, pourquoi la démocratie française devint, jusqu'en 1945, pour les femmes une démocratie exclusive.
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« Je pense que notre retour a été voulu par Dieu, pour que les choses qui sont au monde puissent être connues. » Sans une série de circonstances particulières, la vie de Marco Polo (1254-1324) aurait pu être banale. Plusieurs siècles après sa mort, le périple de ce marchand voyageur qui pensait, en homme de son temps, que la terre était plate, les étoiles accrochées à une voûte céleste fixe et la Bible à prendre à la lettre, continue de nourrir nos songes. Cette biographie nous révèle un Marco Polo à taille humaine, simple, loyal, courageux, attachant. Qui ne manque ni d'humour ni de sagacité. Qui affronte avec stoïcisme la faim, la soif, la maladie, la brûlure du soleil, la froidure des nuits glacées. On est à ses côtés lorsqu'il parcourt la route de la Soie, entre au service de l'empereur mongol, dicte, dans une prison génoise, ses Mémoires à son compagnon d'infortune, un écrivain auteur de romans de chevalerie...
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"Soyons réalistes, réalisons l'impossible." Ernesto Che Guevara (1928-1967) est une icône. Son portrait par Alberto Korda est une des photographies les plus célèbres du monde. Mais que cache cette image trop lisse ? C'est tout le propos du livre d'Alain Foix. Ainsi suit-on le jeune étudiant en médecine dans son voyage en Amérique latine, le voit-on rejoindre le Mouvement du 26-Juillet, renverser Fulgencio Batista aux côtés de Fidel Castro et devenir procureur d'un tristement célèbre tribunal révolutionnaire. Initiateur des camps de "travail et de rééducation", il a occupé plusieurs postes importants dans le gouvernement cubain. Après avoir subitement disparu de la vie politique nationale et avoir combattu au Congo-Léopoldville, celui qui affirmait que "le véritable révolutionnaire est guidé par des sentiments d'amour" est exécuté sommairement par l'armée bolivienne.