Le mouvement féministe contemporain en France a plus de cinquante ans, un temps d'histoire, histoire d'un enthousiasme fou de se retrouver ensemble, émaillé de victoires décisives, mais jalonné de difficultés face à un patriarcat qui se défend bec et ongles.
Dans cette histoire, on oublie souvent une des actrices essentielles?: la «?tendance lutte de classes?» comme elle s'est définie elle-même, après Mai 68, dans les années 1970. Restituer cette histoire occultée, c'est le but de ce livre, réalisé à partir de trois colloques organisés par le Collectif national pour les droits des femmes.
Il aborde l'histoire pionnière du MLF et de toutes ses tendances?: celle des groupes femmes créés dans les entreprises et les quartiers, celle des militantes d'extrême gauche, de gauche, des syndicalistes, qui, impliquées avec conviction, ont bataillé dans leurs organisations respectives.
L'histoire des luttes ouvrières où les femmes ont dû s'affirmer (Lip, Renault, banques, Chèques postaux). L'histoire méconnue des groupes de femmes immigrées ou dans les populations colonisées. L'histoire des luttes pour la visibilisation et l'affirmation des lesbiennes.
C'est aussi celle de la conquête du droit à l'avortement et son remboursement, celle de la création de collectifs féministes?: contre le viol et contre le racisme?; de l'unité avec la création de la Maison des femmes de Paris, d'Elles sont pour et du Collectif national pour les droits des femmes, des combats internationaux avec la Marche mondiale des femmes. C'est la parole de ses actrices elles-mêmes qui donne corps et vie à cette histoire.
Ce sont les contributions de 28 autrices qui donnent corps à ce livre, illustré avec des documents d'époque. Un livre coordonné par Suzy Rojtman, active dès 1974 dans la tendance «?Lutte de classes?» du MLF, qui milite à l'heure actuelle dans le Collectif national pour les droits des femmes.
Dès les années 1950, la France fait venir massivement des ouvriers immigrés de ses colonies et bientôt de ses anciennes colonies, cette vague migratoire succédant à celles qui, depuis la fin du 19e siècle, ont constitué une composante essentielle de la classe ouvrière. L'industrie automobile a particulièrement utilisé cette main-d'oeuvre immigrée, notamment en région parisienne, ou toutes les usines ont vu affluer des travailleurs algériens d'abord, puis marocains, tunisiens, venus d'Afrique subsaharienne, de Turquie et de bien d'autres pays.
Ces travailleurs immigrés n'ont pas seulement apporté une contribution essentielle au développement industriel de la France durant les Trente Glorieuses. Ils ont également été, pour une partie d'entre eux, des militants de l'égalité, nombreux à s'engager dans des associations, à devenir syndicalistes, à animer des grèves, à représenter leurs collègues.
Abdellah Fraygui et Abdallah Moubine furent de ceux-là. Immigrés marocains arrivés en France à la fin des années 1960 et au début des années 1970, ils découvrent les usines françaises, le travail à la chaîne, la dureté des conditions de travail, la répression contre les syndicalistes, le racisme... Mais également des opportunités pour lutter, revendiquer, se battre pour sa dignité, dans les usines et dans leurs quartiers.
Des vies de luttes qu'ils livrent ici dans un récit à deux voix.
Si bell hooks est connue pour son engagement féministe, l'articulation de cet engagement avec les pratiques dans le domaine de l'édu- cation et de la pédagogie a été peu débattue en Europe.
Ce livre est un recueil d'essais sur la péda- gogie de l'émancipation qui aborde non seulement l'importance du féminisme dans les salles de classe mais aussi l'articulation de la théorie et de la pratique dans la lutte fémi- niste afro-américaine.
Hooks y parle de solidarité et d'économie politique, et de la façon dont la pédagogie des opprimés à laquelle elle a été formée par Paulo Freire peut s'appliquer à l'émancipation des Afro-américaines. Des cas particuliers y sont décrits pour souligner l'importance de l'enseignant·e dans la pratique de la liberté.
La traduction de cet ouvrage présente un intérêt bien au-delà du monde uni- versitaire francophone. bell hooks est une enseignante-chercheuse mais son travail trouve une résonance tant dans la théorie que dans les pratiques politiques. Ainsi, Apprendre à transgresser parlera aux lecteurs·rices intéressées par le féminisme, par les pratiques éducatives et par les stratégies antiracistes. C'est d'ailleurs ce qui la distingue de beaucoup d'ouvrages féministes publiés en français : le déploiement de la théorie en pratique de l'enseignement et la transformation de la salle de classe en lieu d'émancipation.
Les pratiques éducatives françaises et la sin- gularité des élèves dans le contexte scolaire ont été débattues en France ces deux der- nières années, et ce livre apporte un regard différent en décrivant des stratégies d'ensei- gnement dans un monde multiculturel.
Par ailleurs, l'intérêt du public pour l'inter- sectionnalité et le féminisme antiraciste s'est développé en France. Le modèle universa- liste français étant réinterrogé et la question de l'identité plus que jamais d'actualité, l'ouvrage de hooks constitue une contribu- tion importante au débat, que ce soit dans le champ disciplinaire des sciences humaines et politiques et dans le milieu associatif fémi- niste, LGBT et antiraciste.
Quinze ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'extrême droite réapparaît sur la scène politique française et ne la quittera plus jusqu'à aujourd'hui. Immédiatement, une opposition apparaît face à cette sombre renaissance, notamment à partir de la guerre d'Algérie. Jean-Paul Gautier nous propose de revenir sur l'histoire des différentes composantes et sensibilités de ces mouvements antifascistes des années 1960 à nos jours. Mais aussi sur leurs débats sur la violence, le rapport à l'État et au champ politique institutionnel. Les mobilisations de partis politiques au cours de cette longue période sont retracées, ainsi que leurs analyses souvent contradictoires sur la nature même de la menace fasciste et les moyens de la combattre. À l'appui d'une riche documentation, l'auteur revient, sur la façon dont cette irruption, en particulier avec le Front national, bouscule les certitudes politiques.
De même, l'histoire des différentes associations, revues et mouvements qui ont combattu le Front national est relatée. Soulignons l'effort de documentation de ces acteurs sur les méandres de l'extrême droite qui constitue certainement un élément décisif dans la connaissance de l'extrême droite aujourd'hui et de son histoire. L'auteur revient sur l'histoire d'autres acteurs de l'antifascisme que sont les associations et collectifs (Ras l'Front, No pasaran...) qui ont été des vecteurs clés de mobilisations contre le Front national, notamment parmi la jeunesse.
Notons enfin, un passionnant chapitre sur le mouvement syndical face à l'extrême droite.
En effet, la pénétration de cette dernière dans le monde salarial ne s'est pas limitée au champ électoral, elle s'est prolongée au sein des organisations syndicales elles-mêmes, allant jusqu'à la création éphémère de syndicats qui lui étaient acquis. L'ouvrage revient en détail sur cette question et le positionnement de l'ensemble de l'éventail syndical sur ce problème et ses pratiques dans le domaine de la lutte contre l'extrême droite.
Ce 7e volume de la collection « Coup pour coup » est organisé autour de dix situations concrètes et actuelles de la politique coloniale de la France :
1) Les territoires d'outre-mer. En 2021, la France en possède encore treize, ce qui permet à la France de disposer d'une zone économique exclusive de plus de 11 millions de km2, lui conférant des droits souverains en matière d'exploitation et d'usage des ressources halieutiques et autres (hydrocarbures).
2) Les interventions militaires.
3) L'accaparement des terres.
4) Les accords dits de « partenariats économiques ».
5) La gestion des migrations.
6) Le franc CFA.
7) La dette des pays des Suds.
8) La surexploitation et le pillage des ressources naturelles (le plus souvent, non renouvelables).
9) Le soutien de la France à la colonisation du Sahara Occidental par le Maroc. En contradiction avec les résolutions de l'ONU, le Sahara Occidental est toujours placé sous domination du Maroc.
10) Le soutien de la France à la colonisation de la Palestine.
Une historienne, un militant associatif et un syndicaliste prolongent ces réflexions, à travers un entretien croisé.
Les dix thèmes sont complétés par une discussion entre une historienne, Ludivine Bantigny (L'ensauvagement du capital, Le Seuil, 2022), un responsable associatif, Patrice Garesio (coprésident de Survie, https:// survie.org/) et un syndicaliste, Jean-Louis Marziani (impliqué dans les grèves de sans-papiers).
Leur échange porte sur les réalités du colonialisme aujourd'hui, les luttes anticoloniales et décoloniales, l'ethnocentrisme européen qui reste à déconstruire dans les milieux anticoloniaux, les politiques migratoires et les oppressions raciales au sein de la société française.
Enfant des ghettos de Philadelphie, adolescente noire dans un monde violent, militante révolutionnaire, chanteuse, cheffe du Black Panther Party : dans ce récit captivant, Elaine Brown revient sur sa vie, ses engagements, ses déchirements.
Née en 1943, Elaine Brown s'engage en politique progressivement, puis, en avril?1968, après l'assassinat de Martin Luther King, rejoint le Black Panther Party, créé deux ans plus tôt à Oakland. Chanteuse, elle enregistre deux albums pour le parti. En 1971, elle entre au comité central et en devient le ministre de l'information. Elle accepte la direction du Black Panther Party en 1974, quand Huey P. Newton part en exil à Cuba.
Cette plongée vibrante dans le parcours et l'expérience d'Elaine Brown ne passe sous silence ni ses erreurs, ni ses trahisons à ses propres engagements, ni les errements de cette formidable aventure collective, qui demeure un grand moment de l'histoire des mouvements de libération. Avec ce récit, Elaine Brown nous invite à repenser l'émancipation, la révolution, l'intime et le politique.
Si la révolution du Rojava a suscité de la fascination et de nombreux débats, elle reste, en 2022, mal connue, y compris et peut-être surtout de ses défenseurs les plus passionnés. Cet ouvrage se propose de remonter aux origines de ce processus politique qui avait débuté avec le mouvement de contestation contre le régime de Bachar al-Assad et qui avait abouti, après l'éviction des troupes syriennes des régions kurdes de Syrie, à la constitution d'entités autonomes ayant vocation à persister.
La période ici décrite s'étend des premières manifestations en Syrie du printemps 2011 aux offensives militaires lancées par l'organisation djihadiste Jabhat al-Nosrah en juillet?2013.
Cette période relativement courte, mais extrêmement dense, soulève un nombre important de questions. Comment une organisation initialement minoritaire, le PYD, a-t-elle pu prendre le contrôle des régions kurdes en 2012 puis imposer son hégémonie politique?? Pourquoi d'autres organisations qui disposaient d'une influence plus étendue et de moyens matériels et logistiques plus importants, ont-elles perdu de leur influence au cours de la révolution syrienne?? En dehors des organisations politiques constituées, quelles étaient les dynamiques sociales qui avaient été le moteur de la contestation politique à partir de 2011??
C'est à ces questions parmi d'autres que l'auteur, engagé volontaire dans les YPG de 2015 à 2018, s'efforce de répondre.
L'histoire récente des banlieues populaires demeure un terrain en grande partie délaissé et inexploré. Pourtant, ces lieux concentrent depuis plusieurs décennies tous les débats, toutes les polémiques, toutes les fractures qui témoignent d'une société française qui ne sait pas comment aborder ces quartiers de relégation où dominent la pauvreté et la ségrégation. Évoquer ces quartiers, c'est convoquer toute la série de fantasmes qui servent de support aux pratiques discriminatoires quotidiennes : ils formeraient la dernière étape avant le « grand remplacement », des « zones de non-droit » qui mettraient l'ordre républicain à feu et à sang... Revenir sur l'histoire politique de ces quartiers, de ces villes, de ces banlieues c'est constater que le droit commun n'y a jamais été instauré malgré les promesses d'égalité républicaine par les promoteurs de la politique de la Ville. C'est aboutir à ce constat implacable: la République, dans les banlieues populaires, c'est pour leurs habitants quarante années d'humiliations sociales.
Cet ouvrage s'efforce de décrire et analyser ce qui s'y est joué durant cette période en abordant avec profondeur et de façon incisive une série de questions : la police, le logement social, l'islam, la politique de la Ville, les politiques conduites dans ces quartiers par les partis politiques aux affaires (de droite comme de gauche), etc. Pour cela, l'auteur s'est appuyé sur des archives locales de communes emblématiques (La Courneuve (93), Mantes-la-Jolie (78), Vaulx-en-Velin (69), Vénissieux (69), Montfermeil (93)...), des documents étonnamment souvent jamais consultés, et sur des entretiens avec des personnages historiques de l'histoire urbaine récente.
Cette histoire politique des banlieues livre finalement en creux ce qu'elles ont toujours incarné : les démons des mauvaises consciences françaises.
Depuis mars 2011, à la suite d'un soulèvement populaire et de sa violente répression, la Syrie est le théâtre d'une guerre entre un régime despote, l'État islamique et différents acteurs internationaux, dont la Russie de Poutine. Récit dramatique d'une révolution dans laquelle un peuple voit son aspiration à la liberté noyée dans le sang.
Syrie : le martyre d'une révolution se veut une vaste fresque des origines du soulèvement syrien, qui a commencé en mars 2011, jusqu'à aujourd'hui. Il décrit les acteurs et les actrices impliqué·es dans le soulèvement et comment la révolution en cours leur a échappé. Les mouvements fondamentalistes islamistes et djihadistes et les interventions régionales et internationales y sont mis en accusation.
Plus particulièrement, la nature du régime de Bachar al-Assad, mélange de despotisme et de corruption, est analysée ainsi que la façon dont il a procédé pour réprimer le mouvement révolutionnaire. L'implication de la population kurde et des organisations kurdes dans le soulèvement fait l'objet d'un chapitre particulier, avec notamment l'influence croissante du Parti de l'union démocratique (PYD) et de ses combattant·es. Enfin, l'internationalisation du soulèvement syrien et les interventions, directes ou indirectes, de divers acteurs internationaux et régionaux sont analysées, y compris l'implication massive des alliés de Damas, de la Russie, de l'Iran et du Hezbollah, sans oublier le rôle des États-Unis et des monarchies du Golfe.
Lors de l'invasion russe de l'Ukraine, de nombreux Syrien·nes ont affiché leur soutien au peuple ukrainien. Marioupol leur rappelle Alep.
La parole aux Ukrainien·nes?: syndicalistes, féministes, acteur·trices de la société civile, universitaires, qui parlent de leur résistance à l'agression impérialiste russe. Mais aussi des voix venues de Russie et du Bélarus. Analyses et contributions diverses éclairent les enjeux du conflit.
Depuis le 24?février, date de l'entrée des chars russes en Ukraine et du début du martyre du peuple ukrainien, les éditions Syllepse ont entrepris de traduire de nombreux témoignages et analyses d'Ukrainien·nes afin d'éclairer l'opinion publique avec le point de vue des premier·es concerné·es, et la réalité de la guerre. C'est l'essentiel de ce travail qui est publié dans cet ouvrage, dont le principal objectif est de donner la parole à celles et à ceux qui résistent à l'agression impérialiste russe.
Ils et elles nous racontent leurs combats et nous disent leurs espoirs où se dessine un horizon d'émancipation sociale et politique. Plus largement, L'Ukraine insurgée revient sur l'histoire du pays et de ses douloureuses relations avec la Russie. Enfin, la nature du régime autoritaire grand-russe et ses ambitions sont également analysées, sans oublier les voix de son opposition démocratique qui subit une sévère répression.
Livre à multiples voix, L'Ukraine insurgée nous raconte les espoirs d'un peuple qui refuse de se soumettre. De sa victoire dépend l'avenir du continent européen.
Donner la parole à ceux et à celles qui, en Ukraine, en Russie ou ailleurs, s'opposent à l'invasion de l'Ukraine par l'armée de Poutine?: les féministes, les syndicalistes, les cyberpartisan·es, les citoyen·nes, les volontaires...
Mais aussi proposer des clés de compréhension du conflit.
Ce livre se veut également un acte de solidarité avec les peuples d'Ukraine en résistance contre l'agression russe.
Avec cette biographie, Olivier Gaudefroy nous propose de découvrir les multiples facettes de la vie de Flora Tristan.
Enfant illégitime d'un colonel de l'armée espagnole, elle se définissait elle-même comme une «?paria?», une exclue, non seulement en raison de sa condition de fille naturelle mais aussi à cause de son ressenti de déclassement social et de sa subordination au système patriarcal.
Très vite, elle épouse la cause ouvrière, elle prône l'unité ouvrière internationale et se bat pour faire prendre en compte le combat féministe dans le socialisme. Mariée à un homme violent, elle échappe au féminicide.
Dans son combat, elle se lie aux grandes figures du féminisme anglais. Son voyage au Pérou, à la recherche de ses origines paternelles, lui permet de découvrir et de dénoncer l'esclavage.
Plus tard, de son enquête à Londres sur la condition ouvrière, naîtra un ouvrage de sociologie, Promenades dans Londres, qui connaîtra un large succès.
Immergée dans les débats du mouvement socialiste de l'époque, Flora Tristan écrit Union ouvrière, qui devient une référence. Elle sillonne la France et donne de multiples conférences pour la promotion du livre qui la conduisent sur les routes de l'est et du sud de la France. Ce périple lui provoque un épuisement fatal.
Son dernier combat, pour la construction d'une organisation ouvrière indépendante, où la libération du prolétariat ne se fera pas sans libération des femmes, reste une de ses contributions les plus importantes à l'histoire du mouvement ouvrier français.
Ce livre est à la croisée de trois histoires : celle de la Coupe du monde de football à travers tout le 20e siècle, mais aussi celles d'un journal, Le Miroir du football, et de son rédacteur en chef, François Thébaud.
Le Miroir du football est né en 1960, et son équipe issue de Miroir Sprint, magazine des éditions J, liées au Parti communiste français. Ce lien avec le PCF, François Thébaud l'a toujours à la fois revendiqué et combattu. Revendiqué car se situant incontestablement dans cette mouvance politique, largement dominante dans la gauche française de l'époque ; combattu, car férocement attaché à l'indépendance rédactionnelle du journaliste. Cette même indépendance l'amènera à rompre en 1976 avec les éditions Vaillant, qui avaient succédé aux éditions J, lorsque ses responsables voulurent imposer leur ligne à l'équipe rédactionnelle du Miroir. La majorité des journalistes le suivirent, le magazine mourut en 1979.
François Thébaud et l'équipe du Miroir furent au coeur de l'occupation de la Fédération française de football (FFF) en Mai 68, avec la célèbre banderole «Le football aux footballeurs» ou, quelques années plus tard, de la création du Mouvement football progrès (MFP).
C'est dans ce contexte qu'avant la Coupe du monde de 1994, François Thébaud écrivit un essai sur les différentes Coupes du monde depuis 1904. Son texte a le grand avantage de reposer sur ses propres reportages au cours de huit éditions, de 1950 à 1978. «Les rapports du sport-spectacle avec ses environnements économique, politique et juridique sont très peu connus. Ces rapports constituent le sujet de ce livre.» Sans doute en application de l'hypocrite principe selon lequel «le sport est apolitique», François Thébaud ne put publier son livre avant sa mort. Le voici enfin édité.
De « Montevideo l'Européenne » à « La Copa del Duce », en passant par « Un sursis pour Videla » ou « L'arrivée de l'Afrique et l'Asie », les 16 chapitres qui vont de l'édition de 1930 à celle de 1994 allient football et contexte populaire et politique. Dans le dernier chapitre, «Un avenir programmé», l'auteur revient sur la nationalisme, la lente décolonisation du football, la puissance de la télévision, la fortune de la FIFA, le pouvoir de l'argent...
En guise de conclusion, une interrogation: «Est-ce un art ou est-ce une industrie? Est-ce un art et une industrie?»
Les protagonistes de ces récits sont des femmes qui, venues de partout dans l'État espagnol et d'ailleurs, décidèrent d'affronter les armes à la main les militaires qui s'étaient soulevés avec Franco en 1936. Leur participation comme combattantes dans la lutte contre le fascisme fut essentielle dans la stratégie guerrière du camp républicain. Mais, au fur et à mesure que la guerre avançait, elles furent renvoyées à des tâches d'arrière-garde, allant jusqu'à discréditer leur rôle de miliciennes. Et l'histoire les oublia.
Mais qui étaient ces combattantes ? Sur quels fronts se sont-elles battues ? Comment ont-elles été retirées du front ? Qu'est-ce qu'elles ont fait ensuite, jusqu'à la défaite de 1939 ? Et après ?
La recherche pour tenter de reconstruire leurs biographies et retrouver le rôle de ces femmes dans ces événements historiques servira de fil rouge pour retracer la guerre d'Espagne depuis une perspective de genre.
Les nombreuses questions sociologiques soulevées par Zahra Ali sur les femmes, le genre et le féminisme en Irak ont trouvé des réponses à travers son expérience quotidienne dans le pays, de 2010 à 2019, ce dont elle rend compte avec virtuosité et profondeur dans son livre.
Virtuosité, car pour une journée de travail de terrain à Bagdad, il lui fallait passer une douzaine de checkpoints au moins se dirigeant de la maison familiale à al-Kazamiyya vers le centre-ville.
Profondeur, car ses observations ethnographiques nous permettent de comprendre comment un des pays les plus avancés de la région aux niveaux de l'éducation, de la santé, de l'emploi et des droits juridiques des femmes jusque dans les années 1990, a pu devenir ce territoire militarisé, contrôlé par des hommes armés, fragmenté, si difficilement vivable pour ses habitants, et encore plus pour les femmes.
Son étude sociologique mêle ethnographie et histoire sociale, politique et orale, et nous offre dans une écriture claire et précise une compréhension fine des expériences sociales, économiques et politiques des femmes irakiennes, permettant d'analyser le contenu, les réalités et la portée politique de leur activisme sous toutes ses formes, et de leurs féminismes.
Son regard postule que les femmes, les questions de genre, et les luttes féministes en Irak, doivent être analysées au moyen d'un prisme complexe, relationnel et historique, sans avoir recours à l'argument d'une «culture» ou d'un «islam» indifférencié afin d'expliquer des réalités sociales, économiques et politiques.
Cet ouvrage de référence, brillamment traduit de l'anglais par Nadia Ghosn, traite autant des femmes, du genre et du féminisme en Irak qu'il est un ouvrage féministe sur l'Irak. Il tend à contribuer à des débats féministes critiques, et à proposer une analyse féministe postcoloniale et transnationale de l'histoire socio-politique contemporaine du pays.
Face aux migrations, au nom de la sécurité et de l'identité, l'Europe, comme une forteresse, ferme la porte aux exilés. Des murs se dressent, les exilés sont maintenus hors des frontières ou retenus dans des camps. Le refus de l'accueil se paye de morts, de condamnation à l'errance, de violations des droits humains et menace en retour l'État de droit et la démocratie.
Pour l'auteure, faire de l'hospitalité un droit fondamental est devenu une nécessité impérieuse pour répondre à cet enjeu. Elle propose d'en faire la boussole nationale et internationale pour construire un autre droit des migrations en le conjuguant avec d'autres principes (fraternité, solidarité, égalité).
Ce livre s'inspire des pratiques multiples de citoyens, associations, villes et territoires engagés qui «?font de l'étranger un hôte?» pour montrer comment l'hospitalité peut devenir un tel droit et préciser son rôle pour fonder la responsabilité des États dans l'accueil des exilés.
Pour nourrir le débat et proposer des réformes, l'auteure explore le parcours migratoire et passe au crible de l'hospitalité comme droit fondamental chacune de ses étapes, du franchissement de la frontière à la période d'accueil, à l'autorisation de séjour ou l'octroi de l'asile, jusqu'aux conséquences d'un éventuel refus Edwy Plenel?: «Marie-Laure Morin fait preuve d'une imagination juridique aussi politiquement décisive et fructueuse que le furent l'invention des notions de crime contre l'humanité et de génocide au mitan du siècle dernier. Loin d'un moralisme abstrait, sa démonstration est ancrée dans le réel, pragmatique et concrète, comme en témoigne l'impeccable précision de ses propositions conclusives.»
- Être une femme, c'est avant tout être sujet à l'oppression - « La boîte à outils de Delphy vient déboulonner le mythe de la naturalité » (nonfiction.fr) « Précis et rigoureux [.], les articles de Delphy témoignent d'une pensée qui, à chaque ligne, essaye de réfléchir à contre-courant, de s'opposer aux évidences qui empêchent les opprimés de s'apercevoir du poids qui pèse sur leurs épaules et qui, parfois, les pousse même à apprécier leur propre oppression. Bref, autant d'invitations à penser autrement » (Rue 89).
Jacqueline Loriod a 18 ans quand elle s'inscrit à la Sorbonne en cet été 1940, celui de la défaite et de l'Occupation. Elle y passe une année, en lettres, avant d'intégrer pour deux ans une école d'élèves infirmières. C'est une jeune fille pleine d'espoir, d'indignation, d'enthousiasme, comme tant d'autres de son temps. Mais Jacqueline Loriod note sur des carnets ce qu'elle fait, ses souffrances, ses pensées, les fondements de ses engagements. Elle commente ses lectures, l'actualité, ses cours. Dans ces récits, on rencontre Georges Duhamel, on croise Maurice Bardèche, dont l'antisémitisme, ainsi que celui de certains professeurs, indignent la jeune étudiante.
Elle est de ces étudiants et lycéens qui défient la police française autant que l'occupant, le 11?novembre 1940 sur la place de l'Étoile, premier acte de résistance.
Tenus de 1940 à 1943, ses carnets ont été découverts au décès de Jacqueline Loriod par ses enfants et mêlent l'histoire familiale à celle de la guerre et de la Résistance. L'écriture de ces carnets est similaire à celle du tract manuscrit, conservé aux archives de la bibliothèque La Contemporaine de l'université de Nanterre, qui est la dernière trace matérielle de l'appel au 11?novembre 1940, et qui donnait une consigne?: «Recopie ces lignes et diffuse-les.» Ce livre constitue un témoignage précieux, présenté et annoté par Alain Monchablon et Robi Morder, avec une postface de Catherine Oguse-Boileau, fille de jacqueline Loriod. Il est illustré par des photographies et documents familiaux ou issus des archives.
Un traité régulant les activités des entreprises transnationales en matière de droits humains est en cours de négociation au sein de l'ONU.
Alors que se multiplient les mesures nationales imposant un «?devoir de vigilance?» contraignant aux entreprises, une directive européenne allant dans le même sens est discutée. Autant de signes de la volonté des États, sous la pression des mouvements sociaux, de (re)prendre quelque peu le contrôle.
La remise en question du pouvoir de l'acteur économique le plus puissant de la globalisation néolibérale marque-t-elle une nouvelle phase de l'ordre mondial?? Au cours de ces dernières années, l'impact et l'impunité des grandes entreprises devenait plus visible, tout comme leurs violations des droits humains, sociaux, économiques et environnementaux. Leur image auprès du grand public du Nord s'est largement détériorée. Leur prétendue autorégulation est apparue pour ce qu'elle est, un mythe.
Mais les multinationales ne continuent pas moins de bénéficier de politiques publiques accommodantes, voire complices, et d'une architecture économique mondiale à leur avantage, sinon à leur service, tandis que les organisations sociales, plus encore dans les pays du Sud, n'ont toujours pas un véritable accès à la justice.
Au-delà du contrôle des acteurs économiques, l'enjeu est la priorité aux droits humains par rapport au commerce et le renversement de l'asymétrie des pouvoirs.
Or, dans les faits, cette dernière se maintient à travers un ensemble de dispositifs véhiculant l'influence des bailleurs de fonds en matière de politique économique et budgétaire, au détriment de la souveraineté des pays concernés et des investissements publics considérables qu'exigent la lutte contre les inégalités et la catastrophe environnementale.
«De telles listes sont dressées depuis les années 1970. Compilées par plusieurs générations de militants, elles sont enfouies dans les caves des archives associatives et présentent toutes le même format, à la fois sec et funeste. On y trouve la date du crime, le nom de la victime, suivis d'une ou deux phrases laconiques. Elles frappent par leur rudesse, leur longueur et leur nombre. Poser une liste conduit inexorablement à en trouver une autre quelques jours plus tard. Ces listes expriment l'idée d'une injustice. Elles dénoncent le racisme et l'impunité du racisme. Elles pointent du doigt les crimes, mais également la grande majorité des procès qui ont fini par des peines légères avec sursis ou des acquittements, quand ce n'est pas un non-lieu qui est venu clore l'affaire.
Elles disent en substance que la racialisation, autrement dit le fait de placer des personnes dans une catégorie raciale afin d'asseoir un rapport de pouvoir et d'en tirer profit, tue deux fois. La première violence touche à l'intégrité physique de la personne. La seconde violence a lieu à l'échelle institutionnelle. Elle est une conséquence du traitement pénal qui ignore la nature raciste des crimes jugés.» De la grande vague de violence de 1973 dans le sud de la France aux crimes policiers des années 1990 en passant par les crimes racistes jalonnant les années 1980, cet ouvrage, issu d'une base de données de plus de 700 cas, nous invite à prendre la mesure de cette histoire à l'heure où le racisme institutionnel et l'action de la police continuent chaque année à être à l'origine de nombreux morts.
«Ce livre est parti d'un désir et d'une nécessité: partager les expériences, les rencontres et les émotions qui nous ont traversées au coeur de la révolution du Rojava. Un désir, parce qu'autant de beauté, d'énergie et d'espoir doivent être diffusés le plus largement possible et doivent pouvoir imprégner chacune de nos vies, chaque lutte à travers le monde. Une nécessité parce qu'il est de notre responsabilité de ne pas faire de ce temps au Rojava une expérience personnelle, mais de faire connaître le projet et la réalité révolutionnaire de celles qui nous ont tant appris.».
L'ouvrage que vous tenez entre vos mains a été pensé collectivement et écrit par des femmes : internationalistes, mères, journalistes, militantes, principalement françaises, qui ont passé de quelques jours à plusieurs années au coeur de la plus jeune révolution du Moyen-Orient.
Avec ce récit, elles nous invitent à découvrir le projet et la réalité des femmes du Rojava et du nord-est syrien, qui depuis 2012 travaillent minutieusement à la création de leurs structures autonomes : autodéfense armée et civile, éducation, coopératives, démocratie de base...
Textes de réflexion, poèmes, contes, extrait de journaux intimes, lettres, interviews, autant de formes différentes qui font palpiter ce livre et permettent d'approcher les émotions les plus intimes, la pratique quotidienne et les enjeux géopolitiques.
Une porte ouverte aux réflexions et discussions pour se nourrir ici de ce qui est expérimenté là-bas.
«Rêve générale» met en avant la dimension individuelle et collective de l'émancipation. La réflexion s'organise autour de deux thèmes principaux :
1- « Ceux d'en bas et l'émancipation », qui vise à redonner tout son sens à l'émancipation individuelle et collective telle qu'elle se joue dans les luttes et les résistances dans le monde : diversité des acteurs, des lieux, des enjeux, en évitant toute catégorisation et hiérarchisation.
2- « Pour une politique de la singularité », qui souligne le fait que chaque lutte est singulière en tant qu'elle singularise un universel. Cette singularité est celle des individus, hommes et femmes, qui, à un moment donné, s'engagent, individuellement et collectivement, dans la construction d'un espace commun de résistance et de lutte. C'est là une rupture, nous dit l'auteur, avec la politique traditionnelle qui formate les luttes à travers de grandes catégories posées comme universelles.
L'ouvrage convoque Karl Marx, Pierre Bourdieu, Jean-Marie Vincent, Jacques Rancière, Étienne Balibar, l'historien anglais Edward P. Thompson et de nombreux auteurs qui contribuent à penser l'émancipation aujourd'hui, dans un rapport de continuité- discontinuité avec le passé.
Ce livre est l'aboutissement du long cheminement d'une réflexion sur l'émancipation individuelle et collective aujourd'hui.
Face à la crise devenue une donnée permanente, face à la barbarie du monde et aux replis identitaires en tout genre, il y a urgence à élaborer une pensée qui se nourrirait des résistances, infiniment diverses, qui aujourd'hui, à travers le monde, invitent à ne pas désespérer, à ne pas se résigner. L'auteur se propose d'y contribuer.
Instrument de réflexion et d'information, cet ouvrage a pour vocation, en ces temps difficiles, de livrer une analyse fouillée d'une importante séquence de changement social.
En ayant au préalable replacé ces trois expériences de transformation sociale dans la longue et incandescente histoire de la gauche latino-américaine, les deux auteurs s'évertuent à en retracer avec rigueur les moments clés ainsi que leurs avancées tout comme leurs fortes limitations.
« Ce livre fait le bilan de cette gauche latino-américaine des années 2000 qui, avec Hugo Chávez au Venezuela, Rafael Correa en Équateur et Evo Morales en Bolivie, avait pour objectif déclaré d'en finir avec la longue nuit néolibérale. ».
Sans rien oublier des questions qui secouent aujourd'hui les forces de gauche et qui touchent autant à la question de l'hégémonie qu'à celle des prédations environnementales ou des oppressions néocoloniales et patriarcales, ils mettent également l'accent sur ce qu'on tend trop souvent à oublier : le poids décisif des rapports de production capitalistes et des luttes de classes qui les traversent.
Dans sa préface, Franck Gaudichaud?décrit en quelques mots le propos de l'ouvrage : « «Histoire incandescente» : c'est dans le feu du brasier des mobilisations de la gauche et des mouvements populaires des Amériques latines et de la Caraïbe, que Patrick Guillaudat et Pierre Mouterde proposent de nous emporter ici. Aujourd'hui, un nouveau chapitre s'ouvre pour les luttes des peuples latino-américains. Pour le lire pleinement, il faut en comprendre le passé récent, les dynamiques et les enjeux stratégiques. C'est précisément ce à quoi contribue ce livre. ».
Dans une première partie, Roland Pfefferkorn revient sur le long processus de laïcisation de l'État en France depuis le 17e siècle et dont la Révolution de 1789 approfondira le développement sans pour autant encore le parachever; Napoléon Bonaparte reviendra d'ailleurs sur certains de ses acquis.
La seconde partie porte sur les avancées de la laïcité historique vers la liberté de conscience et la séparation des Églises et de l'État avec les lois laïques scolaires de?1882 et?1886 qui permettront d'écarter les tutelles religieuses. La loi de 1905, dont l'auteur nous décrit les conditions d'adoption, parachèvera cette évolution.
La troisième partie traite d'abord des points aveugles ou des impensés de cette République laïque, présumée porteuse de valeurs universelles et de progrès. L'idéal laïque est abandonné quand elle poursuit l'aventure coloniale et se montre peu soucieuse des droits de celles et ceux qui subissent les rapports de domination patriarcaux et bourgeois. Les femmes sont scolarisées à part, et écartées du «?suffrage universel?».
En 1914, la «?religion de la patrie?» triomphe et l'idéal laïc est brisé. Après 1945, des arrangements sont obtenus par l'Église catholique, en particulier avec la loi Debré de 1959 qui lui concède d'importants subsides financiers.
Un dernier chapitre est consacré au tournant, intervenu à partir des années 1990-2000, qui se traduit par un dévoiement identitaire et autoritaire de la laïcité historique. Cette reconfiguration de la laïcité discrimine les musulman·es, et en premier lieu les femmes. Elle tourne le dos aux principes de liberté et d'égalité et à la séparation des Églises et de l'État.
De plus, depuis les années 2000, des lois successives consacrent une rupture radicale avec la laïcité historique, tandis que se réaffirme une nouvelle proximité de l'État avec l'Église catholique.
La question de la laïcité devient alors un fer rouge qui travaille la société française dans un sens régressif par rapport à ses idéaux originels.