Samir Amin a entrepri de déconstruire de façon les concepts de « développement » et « sous-développement » vulgarisés par les théories économiques conventionnelles. Chemin faisant, il a développé des thèses audacieuses et originales qui ont fini d´asseoir sa réputation à l´échelle mondiale et d´en faire l´un des plus éminents économistes de la deuxième moitié du 20e siècle jusqu´à sa disparition. Ses audaces et intuitions ont permis de mieux comprendre l´évolution de notre monde. Quand les idéologues du système dominant présentaient la mondialisation comme une ère de « prospérité et de paix pour tous », Samir Amin prédisait plutôt l´avènement de « l´Empire du chaos ». Le chaos entraîné par la mondialisation capitaliste n´épargne aucune région de la planète. Ce sont les guerres commerciales entre les puissances établies, le déchaînement du terrorisme à l´échelle planétaire, les guerres locales et la militarisation du monde pour le contrôle des ressources.
Un point fait aujourd'hui largement débat :
Faut-il soutenir ou au contraire rejeter la souveraineté nationale ? Or pour l'auteur, cette question de stratégie fait l'objet de graves malentendus, tant que son contenu de classe n'est pas identifié.
En effet, dans les sociétés capitalistes, le bloc social dominant conçoit toujours la souveraineté nationale comme un instrument pour promouvoir ses intérêts de classe. On comprend dès lors pourquoi le discours national faisant l'éloge des vertus de la souveraineté ? tout en cachant les intérêts de classe qu'elle sert ?
A toujours été inacceptable pour tous ceux qui défendent les classes travailleuses.
Pourtant, nous ne devrions pas réduire la défense de la souveraineté à cette modalité. Cette défense n'est pas moins décisive pour la protection d'une alternative populaire. Elle constitue même une condition incontournable d'avancées dans cette direction.
La question agraire, l'accès à la terre pour tous, la souveraineté alimentaire sont au coeur des problèmes à résoudre. Et l'agriculture paysanne s'impose comme la voie de l'avenir !
Samir Amin, économiste marxiste franco-égyptien, est depuis de longues années étroitement lié aux mouvements de lutte dans le tiers-monde. Figure intellectuelle marquante du Monde arabe, il a assisté aux mouvements des peuples qui se sont multipliés depuis 2011 dans cette partie du monde, en particulier en Égypte, son pays d'origine et le plus grand des pays arabes, point stratégique de référence dans la région. Dans ce livre, il analyse le mouvement, ses potentialités, mais aussi les dangers de dévoiement et de récupération qu'il court (comme par exemple celui de l'instrumentalisation de l'islam politique par les puissances occidentales). Au-delà de ces événements qui changent la face du monde, il montre comment, pour mieux comprendre le monde arabe, il faut l'envisager sur la longue durée. Cet essai est une esquisse fondamentale de l'histoire du monde arabe et de ses rapports avec les puissances impérialistes.
« Les pages qui suivent ne constituent en aucune manière une « histoire de l'ère de Bandoung ». J'ai proposé, dans de nombreux articles et ouvrages qui couvrent la période, des réflexions et des analyses concernant de nombreux aspects des réponses que les peuples concernés du Sud ont apportées à l'époque aux défis de l'impérialisme dominant. Il s'agit ici de Mémoires qui comportent nécessairement et toujours une dimension personnelle marquée, et ajoutent peut-être, je l'espère, aux analyses proposées.
Les activités de l'Institut africain de développement de l'ONU - IDEP - (de 1970 à 1980) puis du Forum du tiers-monde - FTM - (à partir de 1980) - séminaires et conférences, ateliers de recherche - la poursuite de mes recherches personnelles comme l'occasion offerte par des missions de consultation - de gouvernements et d'organisations politiques - auxquelles il me paraissait utile de donner suite, m'ont offert la possibilité de connaître a peu près le monde entier - Australie et îles du Pacifique exclus. Je n'infligerai pas au lecteur une énumération de mes voyages qui risquerait de lui faire croire que j'exerce la profession de tour operator ou que j'appartiens à la surclasse (pour employer le terme stupide et vulgaire d'Attali dont Gilles Chatelet nous a donné un commentaire fort amusant) des jet-experts. Je ne suis ni l'un ni l'autre, mais plus modestement un militant de la cause du socialisme et de la libération des peuples, convaincu que cette cause est universelle et que, de ce fait, la bataille se déploie sur tous les continents. Les circonstances de ma vie professionnelle m'ont, de surcroît, offert fort heureusement la possibilité de donner un terrain d'action à cette conviction. »
Le cent cinquantième anniversaire du manifeste communiste
L'intervention de l'OTAN en Yougoslavie a signifié un renforcement de l'hégémonie américaine, même si elle le fut à la demande de l'Europe. Débordant les Nations unies, cette action a prouvé l'incapacité des européens à organiser eux-mêmes leur politique ( et leur défense). Les conséquences en sont dramatiques surtout pour le Sud. La recherche d'alternatives semble passer par la construction d'un monde multipolaire.
le moment actuel de la mondialisation libérale est caractérisé par l'émergence de l'impérialisme collectif de la triade composée par les etats-unis, l'europe et le japon à travers laquelle s'exprime la solidarité fondamentale du capital dominant.
dans le même temps. par le contrôle militaire de la planète, les etats-unis " subalternisent " leurs associés dans le façonnement d'un nouveau monde unipolaire. les peuples ne pourront avancer leurs projets propres de progrès social et de démocratisation que si, en contrepoint, ils parviennent simultanément à mettre en déroute le projet de washington et à imposer la reconstruction d'un monde multipolaire.
l'analyse porte, dans les chapitres successifs de ce livre, sur les obstacles qui interpellent le mouvement altermondialiste dans cette perspective. l'europe rompra-t-elle avec l'atlantisme qui réduit son projet au statut de volet européen du projet des etats-unis ? la chine parviendra-t-elle a poursuivre son développement sur la base d'un " socialisme de marché " dont l'adhésion a l'omc remet en question la portée potentielle ? les suds pourront-ils reconstruire une alliance efficace face aux défis ? un programme de réformes radicales de l'onu, que ces perspectives impliquent, est formulé ici dans un esprit qui concilie le respect de la souveraineté des peuples et la démocratisation des sociétés.
l'analyse fait ressortir les interdépendances qui associent les options politiques et sociales propres aux différentes nations et régions et leurs implications en termes de géostratégie.
Le capitalisme est un système mondial. Ses victimes ne peuvent donc faire face efficacement à ses défis qu'à la condition de s'organiser également à cette échelle.
La mondialisation des stratégies du capitalisme dominant appelle celle de la riposte de ses victimes. Alors pourquoi ne pas concevoir qu'une nouvelle Internationale puisse fournir un cadre efficace pour la construction des convergences nécessaires au succès des luttes engagées par les peuples contre le capital oe
La réponse que je fais à cette question est positive, sans hésitation, mais à condition que l'Internationale envisagée soit conçue comme le fut la Première, et non la Seconde, la Troisième ou la Quatrième.
" Vers la fin du XXe siècle un mal a frappé le monde.
Tous n'en sont pas morts, mais tous en furent atteints. On a donné le virus qui était à l'origine de l'épidémie le nom de " virus libéral ". Celui-ci avait fait apparition vers le XVIe siècle à l'intérieur du triangle Paris-Londres-Amsterdam. Les symptômes par lesquels il se manifestait alors paraissaient anodins et les hommes (que le virus frappait de préférence aux femmes), non seulement s'y accoutumèrent et développèrent les anticorps qu'il fallait, mais surent même tirer parti du tonus renforcé qu'il provoquait.
Mais le virus traversa l'Atlantique et trouva dans la secte de ceux qui le colportèrent un terrain favorable, démuni d'anticorps et de ce fait donnait à la maladie qu'il provoquait des formes extrêmes. " Samir Amin.
Karim Mroué est Libanais et marxiste. Issu d'une famille de dignitaires religieux, il a été secrétaire général adjoint du Parti Communiste Libanais avant de s'occuper de la revue Al Tariq.
Samir Amin est Egyptien, économiste, président du Forum du Tiers Monde.
Ils réagissent à la guerre au Liban, réfléchissent à l'état du monde après la chute de l'URSS et le 11 septembre, et - à partir de leurs expériences singulières - à l'histoire des mouvements communistes dans l'ensemble du monde arabe, histoire complexe et riche, largement ignorée en France. Leurs réflexions et leurs interrogations, dégagées de tout dogmatisme, devraient contribuer à refonder une espérance démocratique, voire révolutionnaire.
Cet échange est non seulement précieux pour tous les progressistes du monde arabe, mais, au-delà, pour nourrir le nécessaire dialogue des peuples.