À Séoul de nos jours, une trentenaire en difficulté demande à sa mère de l'accueillir chez elle quelque temps. Cette dernière accepte à contrecoeur : sa fille ne souhaite pas s'installer seule, mais avec sa partenaire. Aussitôt, dans ce huis clos, un climat de malaise naît entre les trois femmes. La mère souffre devant la nature incompréhensible à ses yeux de ce couple. Face à un mode de vie qu'elle désapprouve tant il nie la tradition coréenne du mariage et de la famille, elle oscille entre honte et colère. Alors que les idéaux de la fille se heurtent au sens des convenances de la mère, une réconciliation est-elle seulement possible ?
Un premier roman où l'intime et la délicatesse se côtoient pour aborder ce qui est encore considéré comme un grand tabou en Corée. À propos de ma fille est aussi une invitation touchante à découvrir des femmes coréennes tiraillées entre tradition et émancipation.
Encore une traduction de tao-tö kingoe il est vrai, mais aussi, que nul texte n'est plus ambigu, obscur et même composite.
Mais ce sera la première fois en france que ce poème philosophique est traduit par un chinois qui se sent, se veut taoïste. sur plus d'un point, sa version modifie le sens de phrases qu'on tient d'ordinaire pour allant de soi. m. liou ki-hway, à qui l'on doit une traduction du tchouang-tseu dans cette même collection, aura donc fait beaucoup pour aider les français à comprendre le taoïsme.
Au fait, lao-tseu a-t-il existéoe le tao-tö king est-il ou non antérieur à confuciusoe qu'est-ce au juste que le "non-agir"oe que veut dire, au juste, la première phrase du livre (dont tout dépend)oe une préface d'etiemble, qui fait le point sur les recherches sinologiques, s'efforce de répondre à ces questions.
Né il y a trois siècles au Japon, le haiku est la forme poétique la plus courte du monde. Art de l'ellipse et de la suggestion, poème de l'instant révélé, il cherche à éveiller en nous une conscience de la vie comme miracle. De Bashô jusqu'aux poètes contemporains, en passant par Buson, Issa, Shiki et bien d'autres, Haiku est la première anthologie à présenter un panorama complet de ce genre littéraire, en lequel on a pu voir le plus parfait accomplissement de l'esthétique japonaise.
« Pourquoi aimons-nous le haiku ? » interrogent les préfaciers de ce livre. « Sans doute pour l'acquiescement qu'il suscite en nous, entre émerveillement et mystère. Le temps d'un souffle (un haiku, selon la règle, ne doit pas être plus long qu'une respiration), le poème coïncide tout à coup avec notre exacte intimité, provoquant le plus subtil des séismes. Sans doute, aussi, parce qu'il nous déroute, parce qu'il nous sort de notre pli, déchirant une taie sur notre regard, rappelant que la création a lieu à chaque instant. Peut-être, enfin, parce qu'il sait pincer le coeur avec légèreté. Rien de pesant, rien de solennel, rien de convenu. Juste un tressaillement complice. Une savante simplicité. »
Dans l'intimité de sa chambre, un jeune garçon s'éveille au désir en parcourant les pages d'un livre d'art. Obsédé par la beauté stupéfiante du corps nu, ligoté et mordu de flèches de Saint Sébastien, il laisse libre cours à ses rêveries cruelles où l'objet de son fantasme est torturé, tué, dévoré. Dans la rue, il est attiré par les matelots et les petits voyous, et à l'école par un charismatique camarade de classe dont l'assurance et le charme le subjuguent. Prenant peu à peu conscience de son attirance sexuelle pour les hommes, il tente de réprimer ses pulsions et se fabrique un masque social qu'il porte chaque jour aux yeux du monde. De l'enfance à l'âge adulte, il tentera à tout prix de se conformer à ce qu'il croit être la norme du désir. Mais cette comédie conventionnelle de l'hétérosexualité ne saurait le duper éternellement, et pour ne pas trahir plus longtemps son être profond, il devra trouver la force de regarder en face cette attirance qui le consume, et apprendre, enfin, à vivre en paix avec lui-même.
Enigmatique et pénétrante, La vie rêvée des plantes irradie d'un mélange déroutant de délicatesse et de violence bestiale.
Contraint d'espionner sa propre mère pour un mystérieux commanditaire, Kihyon est confronté à d'obscurs secrets de famille. Par tous les moyens, il tente de réparer les blessures du passé, entre un père réfugié dans la culture des plantes et un grand frère adoré et jalousé, amputé des deux jambes à l'armée. La folle passion de Kihyon pour l'ancienne petite amie de son frère complique la situation...
Ecrire un livre, dit Lee Seng-U, c'est " entrer dans la vase ". Ce récit, cette confession, lourde de culpabilité et d'espoir insensé, nous plonge dans les formes les plus crues et les plus élevées de l'amour.
Deux faits d'expérience personnelle marquent de leur empreinte les quatre nouvelles qu'on va lire : d'une part, la guerre et la défaite (Kenzaburô Ôé avait dix ans quand, le 15 août 1945, l'Empereur d'essence divine s'est adressé à son peuple avec une voix humaine) ; d'autre part, la naissance en 1964 d'un fils mentalement diminué (Ôé avait vingt-neuf ans).
Il ne s'agit aucunement, toutefois, de récits autobiographiques, si grande est la puissance d'une création poétique alliant avec aisance la réminiscence au fantasme, le vécu au mythique, la brutalité au lyrisme.
Gibier d'élevage séduira par la rigueur toute classique avec laquelle l'auteur décrit l'impact sur les esprits, dans un village montagnard, de la présence d'un prisonnier noir américain.
Dans Dites-nous comment survivre à notre folie nous sont contés les efforts d'un père pour nouer avec son fils, handicapé mental, des relations aussi étroites et fines que possible. Quant à Agwu le monstre des nuages, récit étrange oscillant du quotidien le plus concret à la vision hallucinatoire, il fait intervenir le fantôme d'un bébé qu'on a fait disparaître à peine né en raison d'une malformation supposée de l'encéphale.
Plus déconcertante, mais d'une élaboration très originale, est l'autre nouvelle de " fin de guerre " : Le jour où il daignera lui-même essuyer mes larmes, qu'il faut lire d'une traite sans se laisser arrêter par les étrangetés initiales : une savante et progressive desquamation dévoile peu à peu le tuf du récit.
Dans une traduction extrêmement élégante d'andré beaujard, nous présentons au lecteur français un des plus beaux livres de la littérature japonaise, les notes de chevet de sei shônagon.
Composées dans les premières années du xie siècle, au moment de la plus haute splendeur de la civilisation de heian, au moment où kyôto s'appelait heiankyô, c'est-à-dire " capitale de la paix ", par une dame d'honneur, sei shônagon, attachée à la princesse sadako, laquelle, mourut en l'an 1000, les notes de chevet appartiennent au genre sôshi, c'est-à-dire " écrits intimes ". avec les heures oisives de urabe kenkô et les notes de ma cabane de moine de kamo no chômei, les notes de chevet de sei shônagon proposent, sous forme de tableaux, de portraits, d'historiettes, de récits, une illustration du japon sous les fujiwara.
Avec l'auteur du roman de genji, noble dame murasaki, sei shônagon est une des plus illustres parmi les grands écrivains féminins du japon. si l'auteur du roman de genji est constamment comparé, dans son pays, à la fleur du prunier, immaculée, blanche, un peu froide, sei shônagon est égalée à la fleur rose, plus émouvante, du cerisier. ceux qui liront, nombreux nous l'espérons pour eux, les notes de chevet sont assurés de découvrir un des plus beaux livres jamais écrits en langue japonaise, et qu'une introduction et des notes leur permettront de goûter dans le plus intime détail, y compris tous les jeux subtils sur les mots.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, des enfants d'une maison de correction fuient les bombardements et se réfugient dans un village de montagne.
Leur éducateur les place sous l'autorité d'un maire convaincu qu'un mauvais enfant doit être supprimé " dès le bourgeon ". Le jeune narrateur et son petit frère font partie de ce groupe de délinquants bientôt à la merci des villageois haineux, qui les contraignent à enterrer des animaux victimes d'une épidémie. Quand trois personnes meurent, contaminées, les villageois, pris de panique, abandonnent le village en y enfermant les enfants, qui prennent possession des maisons désertées et esquissent même les règles d'une vie en société.
Temps suspendu, unique dans cette histoire de bruit et de fureur, où s'expriment les douceurs de la fraternité et les joies d'un premier amour. Malgré la présence d'un jeune Coréen et d'un soldat déserteur qui tentent de les aider, l'affrontement avec les villageois de retour ne pourra être évité. Cette impressionnante fable sociale écrite en 1958 appartient à la grande veine de Kenzaburô Ôe. Densité, richesse d'analyse, foisonnement de l'imagination, violence, émotion: toutes les qualités du Prix Nobel se trouvent réunies.
Noboru, garçon de treize ans, surprend les amours de sa mère, une jeune veuve, avec un officier de la marine marchande, ryüji.
Noboru fait partie d'une bande de garçons qui se veulent durs. ils prennent d'abord le marin pour un héros. quand ils découvrent qu'il n'est qu'un brave homme, affectueux et honnête, ils décident d'en finir avec lui et commencent à procéder sur un chat à l'horrible sacrifice qu'ils ont décidé d'accomplir...
Propos, anecdotes, brèves paraboles, maximes, c'est dans les entretiens qu'on trouve le visage le moins fabuleux de confucius.
Il y a du socrate en lui, du montaigne aussi. maître k'ong séduit par une bonhomie, une bonne humeur, une générosité, une gentillesse, qui savent concilier la vigueur des principes et les faiblesses des humains. le politique, le moraliste, le philosophe, c'est dans les entretiens qu'on peut trouver le premier état de la pensée de confucius. " nul écrit, constate pierre ryckmans, n'a exercé une plus durable influence sur une plus grande partie de l'humanité.
" les entretiens sont après deux millénaires le livre central de l'histoire de la chine.
Pierre ryckmans, un des maîtres de la sinologie actuelle, aura consacré six ans à établir pour les lecteurs de langue française la version enfin définitive de ce classique dont un grand savant japonais de notre époque ne craignait pas de dire que c'est " le plus beau livre du monde ". plus tempéré, ryckmans écrit que ce texte a conservé à travers les siècles " une verdeur, une vigueur et une cohérence étonnantes ".
Le voici traduit comme il devait l'être : à ras du texte dont il rend ainsi la concision, le charme et la force. le vieux maître est là, devant nous, vivant, qui bavarde, plaisante et nous dispense un enseignement toujours précieux. la version de pierre ryckmans des entretiens sera aussi perdurable que la pensée de maître k'ong.
Je suis devenu bouffon.
C'était mon ultime demande adressée aux hommes. extérieurement, le sourire ne me quittait pas ; intérieurement, en revanche, c'était le désespoir. ainsi se présente yôzô, né dans une famille riche du nord du japon, qui veut être peintre, abandonne ses études au lycée de tôkyô pour travailler dans des ateliers, mais s'initie plus vite au saké et aux filles qu'au dessin et à la peinture. d'amours malheureuses en amours malheureuses, après n'avoir été qu'un médiocre caricaturiste de revues de second ordre, il échoue à vingt-sept ans, malade, tel un vieillard, dans une vieille chaumière irréparable d'oú il rédige l'histoire de sa vie, " vécue dans la honte ", et alors qu'il ne connaît plus désormais ni le bonheur ni le malheur.
Comment découvrir ou redécouvrir le Japon? Comment comprendre ce pays complexe où cohabitent harmonieusement tradition et modernité? Car au-delà de sa gastronomie qui a traversé les frontières, de la fameuse cérémonie du thé, de son cinéma actuel et passé, de la figure du samouraï ou celle de la geisha, que savons-nous réellement de tout ce qui fait le quotidien des Japonais et participe à définir l'identité profonde du Japon?
À travers près de 100 notions essentielles, l'écrivain japonais Yutaka Yazawa livre une analyse à la fois fine et limpide de ce qui fonde l'esprit du Japon. Depuis l'histoire de ses grands principes philosophiques et esthétiques, jusqu'aux pratiques culinaires ou artistiques d'aujourd'hui, cet ouvrage lève le voile sur ce qui régit la vie quotidienne de la société japonaise. Principe du wabi-sabi, saveur umami, art du haïku, secrets de longévité, préparation du bento... un véritable guide pour partir à la découverte d'un pays fascinant à l'art de vivre unique.
Vingt ans après le pauvre coeur des hommes, l'un des derniers romans de natsume sôseki, paraît enfin, dans une excellente version due au japonologue jean cholley, l'ouvrage qui d'emblée lui valut la célébrité : je suis un chat.
Mort en 1916 à quarante-neuf ans, il vécut aux confins de la psychose la déchirure dont pâtirent tous les intellectuels nés avec la révolution industrielle, politique et culturelle du meiji.
Formé aux lettres classiques chinoises, au haïku, mais envoyé en angleterre de 1900 à 1903 pour pouvoir enseigner ensuite la littérature anglaise, il s'imprégna si profondément du ton de swift, de sterne et de de foe que, sans nuire à tout ce qu'il y a de japonais dans je suis un chat, cette influence nous impose de penser au voyage de gulliver chez les houyhnhnms ; sans doute aussi d'évoquer le chat murr d'hoffmann.
C'est pourquoi le traducteur peut conclure sa préface en affirmant que je suis un chat " suffit amplement à démentir l'opinion si répandue selon laquelle les japonais manquent d'humour ". ni hegel, ni marx, ni darwin, qu'il a lus, ne lui ont fait avaler son parapluie.
La gouaille, voire la désinvolture apparente, n'empêchent pas les chapitres de s'organiser, cependant que tous les styles (jargon des savants ou du zen, ou argot d'edo, ancien nom de tokyo) se mêlent pour présenter la satire désopilante d'une société en transition, et même en danger de perdition.
Kushami-sôseki se demande parfois s'il n'est pas fou, mais c'est la société d'alors qui devient folle, elle qui déjà enferme en asile ceux qui la jugent. le chat ne s'y trompe jamais, lui : aucun ridicule n'échappe à ce nyctalope. alors que peut-être on en devrait pleurer, on rit follement. si vous voulez comprendre le japon, identifiez-vous au chat de soseki. sur un autre registre, vous retrouverez le meiji de la sumida, le chef-d'oeuvre de nagaï kafû.
Les lettres d'Ichirô, élève au lycée de Tokyo, et d'Isoko, sa mère, qui vit à la campagne, tissent un lien unique que la séparation rend plus fort.
Touchante est la délicatesse maternelle qui respecte la liberté et la sensibilité de son fils à une époque aussi douloureuse que celle d'Hiroshima durant la guerre. Touchante est la plume d'Ichirô qui écrit : " Faites rage, lames et vents du monde impur, moi j'avance dans la vie, aux côtés de ma mère. "
Un vieil écrivain, Shunsuké, est fasciné par la beauté exceptionnelle de Yûichi, un jeune homosexuel. Shunsuké, dont l'oeuvre est connue, mais déjà achevée, a consacré toute sa vie à l'esprit et à la création. En Yûichi, c'est la liberté du corps, l'esthétique réduite à sa pure apparence physique et à la jouissance immédiate, que le romancier découvre. Yûichi, conscient de sa sexualité, hésite à épouser Yasuko, dont l'écrivain est amoureux. Il se confie au vieillard qui, au terme d'un pacte diabolique, l'incite à se marier. Shunsuké pourra dès lors manipuler le jeune homme comme une marionnette, comme un personnage incarné d'un roman qu'il n'écrira jamais. Sa misogynie déclarée, sa rancoeur à l'égard des femmes qui l'ont fait souffrir durant toute sa vie trouvent ainsi un cruel assouvissement. Mais c'est compter sans l'intervention d'autres manipulateurs et surtout croire qu'il peut lui-même échapper à la séduction de Yûichi.Rédigé entre 1950 et 1953, Les amours interdites décrit avec audace et sincérité l'univers homosexuel du Tôkyô d'après-guerre. Mais c'est surtout le roman où Mishima entreprend d'exposer sans fard sa conception de la sexualité, des rapports familiaux et sociaux, et ses théories esthétiques et philosophiques. À propos des Amours interdites, l'auteur devait écrire:«J'ai formé le projet insolent de transformer mon tempérament en un roman et d'ensevelir le premier dans le second.»
Pour la première fois en France, cette édition propose d'explorer l'ensemble de l'oeuvre de Rabindranath Tagore en la replaçant dans son contexte historique et culturel unique, celui d'une Inde en plein éveil indépendantiste. Divisé en trois grandes périodes, ce recueil propose de lire les textes de Tagore dans l'ordre chronologique de composition - ou de publication lorsque la date d'écriture demeure inconnue. Chacune des parties est introduite par une brève présentation historique.
Ce volume offre un choix de textes illustrant de manière significative les différents genres littéraires abordés par l'auteur, selon un fil chronologique qui permet de suivre l'évolution de la pensée de Tagore :
- Poésie : L'Offrande lyrique (Gitanjali), La Corbeille de fruits, L'Esquif d'or, L'Écrin vert.
- Théâtre : Amal et la lettre du roi, Chitra.
- Romans et nouvelles : La Maison et le Monde, À quatre voix, Mashi, Le Vagabond.
- Essais : Vers l'homme universel, La Religion de l'homme, Sâdhâna, et plusieurs essais non repris en recueils.
- La pièce Les Lauriers de sang, inédite en français.
- Le court récit L'Éducation du perroquet, texte critique sur l'éducation.
- L'essai « Le Sens de l'art », synthèse de sa pensée sur l'art.
- Le discours de Tagore à l'occasion de la remise de son prix Nobel de littérature (1926).
Un cahier hors-texte en couleurs de 16 pages reproduit des peintures de Rabindranath Tagore, réalisées pour l'essentiel à partir de 1928.
Préface de Saraju Gita Banerjee et de Fabien Chartier.
Édition présentée et annotée par Fabien Chartier.
Traductions de David Annoussamy, Nicole Balbir, Sara Gita Banerjee, K. Bhattacharya, Christine Bossennec, Jane Droz-Viguié, André Gide, Cecil Georges-Basil, Jean Herbert, K. Johnston, Andrée Jouve, Hélène du Pasquier, F. Roger-Cormaz, Madeleine Rolland.
Dans le " bric-à-brac " de la société japonaise des années 60, les fantômes des ci-devant aristocrates hésitent encore à danser avec les premiers parvenus du miracle économique.
Les occidentaux, démasqués par leur épouvantable grand nez, se comportent toujours comme en pays conquis. les rues sont pleines de jeunes filles qui n'en sont plus, de petits jeunes gens détestables dévorés de paresseuses ambitions. l'élite s'embourgeoise en se laissant prendre aux mensonges du luxe et de la mode, tandis que commencent à régner la démocratie des propriétaires de voitures, la civilisation des loisirs.
Comment vivre, lorsque - comme le diamant de trois carats que l'on porte au doigt - on a été taillé dans une autre époque, la chair, soudain révélée, pourrait-elle faire disparaître ce désert que l'héroïne - trente-neuf ans : le même âge que mishima au moment oú il écrit son roman - voit s'étendre aux confins de sa brillante réussite sociale, ce goût acre de sable qui la saisit au plus intime d'une liberté féminine cueillie au passage sur les ruines encore fumantes du japon féodal ?
La chair ! ses cheminements obscurs, son arrogance animale, mais aussi sa pureté, sa grâce unique qui semble ouvrir à l'imagination un monde absolu sans autre limite que la mort.
Hélas ! l'école de la chair, surtout lorsque le professeur n'est qu'un ange déchu, peut-elle être autre chose que l'école de la vie, ou pis, l'école des femmes ?
Alors, que reste-t-il ? sinon l'âpre continuité du courage qui pousse certains êtres à aller jusqu'au bout de leur lucidité et de leur générosité, à prendre l'entière responsabilité de ce qu'ils imaginent " tout seuls dans leur tête ".
Les grands thèmes de l'oeuvre sont ici en suspension avant le précipité final de la tétralogie.
Instant de grâce oú tout semble possible : la noblesse de coeur, reconquise sur la noblesse de sang, trouve les chemins de cette gentillesse qui s'épanouit parfois dans les bas-fonds grouillants de nos sociétés.
Un miséreux qui hésite entre le vol et la mort s'abrite de la pluie sous la porte rashô, une ruine transformée en charnier.
Dans la pénombre du crépuscule, il découvre une vieille hirsute et fantomatique en train d'arracher les cheveux des cadavres...
Violents, étincelants, souvent terrifiants, ces brefs récits plongent le lecteur dans les ténèbres d'un japon de légende, peuplé de sorcières, de brigands et de personnages aussi surprenants qu'inquiétants.
« Je propose une vie à vendre. À utiliser à votre guise. Homme, 27 ans. Confidentialité garantie. Aucune complication à craindre. » Lorsque Hanio Yamada rate son suicide, il décide de mettre sa vie en vente au plus offrant dans un journal local de Tôkyô. Le premier acheteur ne se fait pas attendre et entraîne ce héros involontaire dans une course folle au coeur d'un monde de gangsters sanguinaires, d'espions et de contre-espions, de potions hallucinatoires, de femmevampire, de carottes empoisonnées, de junkie désespérée et d'explosif artisanal. Alors que les cadavres se multiplient autour d'Hanio, celuici demeure miraculeusement vivant et se demande comment enrayer cette machine infernale. La vie aurait-elle finalement une valeur à ses yeux, et serait-il enfin prêt à en payer le prix ?
Dans cette parodie jubilatoire de roman policier, Yukio Mishima subvertit également les codes de l'espionnage et dévoile une facette méconnue de sa personnalité d'écrivain. « Roman d'aventures psychédélique » et méditation cynique et saisissante sur la mort et la morale, Vie à vendre révèle la maîtrise exceptionnelle d'une écriture capable de faire accepter toutes les invraisemblances. Un coup de maître littéraire resté jusqu'à ce jour inédit en France .
Une base américaine de la province de Kandahar en Afghanistan. Au loin, on distingue la silhouette d'une femme enveloppée dans sa burqa. Elle est descendue de la montagne en fauteuil roulant, puisque ses jambes ont été arrachées. Elle vient réclamer le corps de son frère, un chef tribal pachtoun abattu lors d'une offensive lancée contre les Américains.
L'état-major reste méfiant : s'agit-il d'une soeur endeuillée, d'une kamikaze, d'une envoyée des talibans, d'un terroriste travesti en femme ou d'une tentative de diversion ?
Sans jamais prendre parti, l'auteur donne la parole aux différents protagonistes - la jeune femme, l'interprète, le médecin, et plusieurs officiers ou soldats. Il nous permet ainsi de faire l'expérience d'un conflit cruel et absurde, en en révélant toute la complexité. Chaque personnage, quel que soit son camp, est non seulement doté d'une voix, mais également d'un visage, d'une personnalité qui lui est propre.
Une Antigone à Kandahar revisite certains grands thèmes de la tragédie grecque tout en s'interrogeant sur les dommages collatéraux de la guerre, l'idéalisme, les valeurs occidentales. Magnifique et magistral.
Pour les philosophes, les poètes, les gens de goût, voici un livre qui a marqué notre temps, à voir le nombre d'ouvrages de commentaires qu'il a suscités:l'oeuvre de Tchouang-tseu fascine tous ceux qui désirent en savoir plus sur le Tao que ce que nous en dit le Lao-tseu. Ce Tchouang-tseu complet permet de découvrir l'un des cinq ou six philosophes qui ont pensé pour de bon sur la terre depuis que l'écriture existe, un écrivain parmi les plus forts, les plus brillants, les plus poétiques de la Chine. Ainsi pourvu des textes capitaux, tout philosophe, tout poète, tout lecteur pourra s'initier à l'une des philosophies les plus riches de sens sous l'apparent non-sens.
Une fleur de lotus sortant de l'eau pure, / Naturelle, dépourvue de toute décoration, telle devrait être la poésie selon Li Bai. Il vécut au VIIIe siècle et demeure la figure la plus marquante de l'époque Tang, considérée comme l'âge d'or de la poésie chinoise. Mais il y a trois mille ans que les Chinois sont poètes et que leur poésie est en quête d'harmonie. Qu'elle dit le monde tel qu'il est : Affaires humaines, changeants nuages, / Pourquoi? (Gao Qi, XIVe s.). Rêve à ce qu'il pourrait être : Les fleurs de pêcher sur l'eau s'éloignent ; / Il est un autre monde, pas celui des humains (Li Bai). Aspire à l'union avec la nature : Je crains de vieillir plus vite si les fleurs sont fanées (Du Fu, VIIIe s.). Dénonce ce qui détruit les êtres de l'intérieur : Pleurs jamais taris, / Souillures jamais lavées, / Ardeur jamais consumée, / Honte jamais épurée, / Cette vie incertaine, évanescente, / Où trouvera-telle enfin son havre de paix? (Guo Moruo, 1892-1978.) Se laisse hanter par l'Histoire : Les lianes sauvages, mues par on ne sait quel amour, étreignent les os blanchis par la guerre (Yuan Haowen, XIIIe s.). Fixe pour l'éternité les moments fugitifs des amours heureuses : Défense au soleil de relever les stores de tes yeux, / Défense à la brise de brosser tes sourcils, / Personne ne doit te réveiller, / Ouvrons l'ombre d'un pin pour couvrir ton sommeil (Wen Yiduo, 1899-1946). Et rivalise avec les autres arts, peinture ou calligraphie : Le vent remue l'écume : mille pétales de fleurs ; / Les oies touchent le ciel : une rangée de caractères (Bai Juyi, VIII-IXe s).
Reproduire trois mille ans de poésie en deux fois moins de pages, il ne faut pas y songer. Mais le choix des plus beaux textes, jades entre les cailloux, est en Chine une pratique aussi ancienne que la poésie même ; la première anthologie, le Shijing, aurait été compilée par Confucius au Ve siècle avant notre ère. Dans un temps où la Chine se fait moins remarquer par l'éclat de sa littérature que par ses exploits économiques, la Pléiade propose, en quelque 1850 poèmes dus à plus de 400 auteurs, une traversée de l'océan poétique qu'elle a produit.
Il fallait faire des choix représentatifs : on s'y est efforcé, sans suivre aveuglément les anthologies chinoises. Car il convenait aussi de choisir des textes qui soient parlants pour (et puissent être dits par) le lecteur francophone. La musique des mots, les rythmes, les couleurs, les images doivent résonner dans notre langue pour que quelque chose de l'imaginaire de l'auteur nous soit transmis. Les traducteurs qui ont tenté l'aventure l'ont fait avec leurs goûts, leur talent, leur amour des textes, et l'idée que se fait chacun d'eux de la Chine et de sa littérature. Dans le paysage qu'à eux tous ils ont redessiné, chacun tracera sa propre route.